Tuesday, May 08, 2007

2e tour: Sarko enterre enfin Chirak! (No flowers by request)



Tout d’abord, bien entendu, j’avoue, je me suis planté ; j’ai péché par pessimisme. J’ai commis la faute de croire mon environnement social représentatif, j’ai cru naïvement que les intellectuels du quartier latin n’étaient pas si coupés du pays que cela ; j’ai surestimé l’impact des média et de la diabolisation à l’œuvre ; j’ai surestimé également l’influence de la presse, des Unes façon Marianne, Nouvel Observateur et Libération ; j’ai commis l’erreur de croire mon propre univers de référence représentatif des " inquiétudes " de Français. J’ai cru la jeunesse à l’unisson de Canal + et de la Sorbonne. J’ai cru voir la France se dresser comme un seul homme, trembler comme une feuille, et bégayer de façon hargneuse : " Sarkozy est un danger pour la France. " Et bien j’ai eu tort, totalement tort, cette élection m’a au moins appris que le monde qui est le mien n’est pas la France, que le monde sanctuarisé de la fonction publique où j’évolue, qui se gargarise si volontiers de mots et de pseudo-résistances, ne représente en rien la France qui souffre, qui se bat, qui rencontre chaque jour la concurrence internationale, qui ne compte pas ses heures de travail, qui n’habite pas dans les bunkers parisiens, qui entreprend et qui affirme, qui lutte. Je vis dans une cage dorée, une cage où nul n’a à se battre pour vivre, une cage où le traitement est assuré à la fin du mois, où la mondialisation ne me menace en rien, où elle m’apporte la possibilité de partir dans un campus étranger, lui aussi bunkerisé, je vis dans un monde où l’on ne sait pas ce qu’est la douleur pour un employeur de se séparer d’un employé, où l’on ne sait pas ce que manquer d’argent à la fin du mois veut dire, où l’on ne sait pas ce qu’est la peur du lendemain ; je vis dans un monde où l’on peut se gargariser de belles idées et de grands idéaux parce qu’on n’a jamais eu à faire l’épreuve de la réalité, parce qu’on a toujours eu papa et maman derrière en cas de petit problème. Mais je vis dans un monde qui ne cesse de donner son avis, d’énoncer ces sentences, d’asserter, un monde de haine, de dénonciations morales, de postures résistantes, de ressentiment, de puceaux du réel. Mais cette campagne présidentielle m’a fait comprendre une chose fondamentale : je suis à ce monde, mais je ne suis pas de ce monde…

Historique, tel est le maître-mot de cette journée du 6 mai 2007.

Historique parce que l’époque Mitterrand-Chirac est morte, expulsant avec elle son produit, le FN, au caniveau ; la page Mitterrand se tourne enfin, emportant avec elle son immobilisme, ses mensonges, ses aberrations économiques, ses promesses délirantes, ses copinages avec les dictateurs et / ou les meurtriers d’extrême-gauche, emportant avec elle la France artificielle et liftée de Jack Lang qui semblait en avoir, hier soir, ras la teinture. Mais c’en est fini aussi de l’ère Chirac, de l’homme de gauche gominé de droite, de l’homme de toutes les trahisons, de toutes les affaires occultes, de tous les détournements, de tous les mensonges, de tous les " pschit ! " et autres " abracadabrantesques " magouilles, de ce mépris cocardier à l’égard des pays de l’Est, de ce pitre grotesque promulguant le même jour une loi avant d’en suspendre dans la seconde les décrets d’application, de cet énarque halluciné qui a si bien prolongé le Grand Œuvre mitterrandien.


Historique parce que la France a élu pour la première fois un homme sur un programme explicitement de droite : le travail, l’ordre, la morale, la sécurité, la fierté nationale, la grandeur de la France, voilà ce que furent les thèmes de campagne de Sarkozy, qui osait là ce que Giscard et Chirac n’avaient jamais tenté. La France n’a pas dit oui à une droite façon Chirac, c’est-à-dire à un rad-soc instable noyé dans des slogans démagos (la France pour tous), mais elle a dit oui à un programme assumé, fondé sur le travail et la fierté de soi.

Historique parce que pour la première fois un président est élu sur des thèmes ne promettant pas les aides, la vie facile, le miracle de la redistribution, l’accroissement sans fin de la baudruche administrative. Pour la première fois, un candidat en position de favori n’a pas flatté les Français, ne les a pas confortés dans leurs avantages acquis, ne leur a pas dépeint le travail et la concurrence sous les traits du diable. Oui il va falloir travailler, oui la fonction publique doit considérablement être allégée, oui les fonctionnaires doivent, eux aussi, être notés au mérite, oui les cotisations pour les retraites doivent être les mêmes pour tous, oui la France a le droit de décréter qui est bienvenu chez elle et qui ne l’est pas, oui la France doit être fière de son histoire et n’a pas à s’en repentir : " la concurrence des mémoires, c’est la haine des autres. " Qui d’autre aurait eu le courage de dire cela, un soir d’élection, devant les caméras du monde entier ? Oui, les droits n’ont pas de sens sans des contreparties, le devoir de servir son pays. Oui la liberté pédagogique doit briser les carcans pédagogistes de l’Education Nationale. Oui les voyous sont des voyous, et non des " victimes " phantasmées d’une société fasciste. Oui un homme qui tue un enfant innocent est une " racaille ".


Historique aussi parce que le PS français semble enfin prêt à faire son aggiornamento ; DSK l’a clairement dit hier soir, dans des mots et des gestes un peu vifs à l’égard de Jack Lang, le PS doit enfin s’ouvrir au monde, prendre acte du réel s’il veut retrouver un minimum de crédibilité économique et sociale. DSK, Kouchner et d’autres semblent prêts à le faire : mais la reconnaissance du réel supposerait d’abord que Mme Royal comprenne qu’elle a perdu…
Historique parce que les Français semblent avoir compris, malgré le matraquage médiatique, que la France ne s’en sortirait pas par le maintien du modèle social français, que la France tomberait dans le précipice si elle poursuivait sa politique d’assistanat et de gaspillage hallucinante. La France semble avoir compris, parce qu’un candidat courageux a préféré lui dire qu’elle devait se mettre au travail plutôt que de flatter les instincts de paresse et de loisirs des 35 heures, que la situation était dramatique, et que seule la sauverait l’adoption de ce qui fonctionne en Angleterre, en Espagne, en Allemagne, au Japon, à savoir un libéralisme mâtiné de social. Le plein-emploi passe par là, la croissance aussi.

Historique parce que pour la première fois les créateurs de richesse, les entrepreneurs et les employeurs ne sont plus désignés comme les bourreaux des employés ; historique tout simplement parce que la France, y compris de droite, a rompu avec la lutte des classes.

Historique enfin, et surtout, parce que pour la première fois un Président a exalté la fierté d’un peuple et d’une Nation, la fierté d’avoir derrière soi Jeanne d’Arc et la fête de la Fédération comme disait si justement Marc Bloch, la fierté d’avoir eu Hugo et Chateaubriand, les Droits de l’Homme et Versailles, Jaurès et de Maistre, Descartes et Condillac, Tocqueville et Rousseau, Les Rois de France et de Gaulle. C’est là la libération symbolique qu’a apportée Sarkozy, qui a mis fin à cette mortifère haine de soi, qui a vengé la France de la haine des Sollers et autres BHL (deux soutiens phares de Royal) qui, depuis si longtemps, se sont plu à dépeindre " la France moisie ", sous la posture du dénonciateur moral, ne trouvant plus de jouissance que dans la haine de soi. Même si Sarkozy échoue, je lui saurai personnellement gré d’avoir brisé ce rapport morbide à son propre pays qu’une certaine gauche de Saint Germain s’était plu à imposer dans le monde intellectuel.

Bien évidemment, le programme de Sarkozy ne sera pas appliqué facilement ; des blocages, des résistances se manifesteront. La CGT, FO, SUD, fidèles à leurs habitudes, feront grève, bloqueront le pays. Il faudra que Sarkozy et son gouvernement tiennent ; qu’ils tirent profit de ce large mandat universel que le peuple leur a remis. Il ne faudra pas reculer devant les intimidations gauchistes ; il ne faudra pas craindre les quelques agités de la LCR qui, comme hier soir, chercheront l’affrontement, la casse, l’agression. Copée le sait, les électeurs le lui ont dit : tiendrez-vous ? Aurez-vous le courage d’assumer la légitimité de votre mandat issu du suffrage universel contre les teneurs de pancartes lâchés dans les rues ? Il assure que oui. J’en doute. Mais Sarkozy savent que si lui et son équipe échouent, s’ils reculent, s’ils se chiraquisent, le verdict des urnes de 2012 sera dramatique : un FN lifté sous les traits de Marine pourrait canaliser les mécontentements et les frustrations, les haines et les tensions. En 2012, il ne pourra pas jouer la rupture, il est acculé à la réussite.

Sarkozy croit à la théorie des 100 jours, il a lu Friedmann ; dès septembre 2007, nous saurons quelle est la réalité de sa détermination et la force de son caractère. Merkel, Blair, Zapatero et Aznar lui font confiance ; l’espoir est permis.

1 comment:

  1. Anonymous8:08 am

    tu causes bien Léon..un peu longuet quand meme..

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